12 sept. 2017

Irma


Finalement, on l’aura eu notre ouragan, et pas un des moindres. Récit des péripéties :

Samedi 9 Septembre, 7 heures
Déjà 3 jours que je suis revenu en urgence à Varadero, avec de nouvelles sangles. Bien que 100 bateaux partent s’abriter dans la mangrove, j’ai opté avec Claude (du cata Gulliver) pour la solution la plus raisonnable : laisser nos bateaux au sec, les empêcher de bouger, et dormir à l’hôtel. Une seule journée aurait suffi pour refaire l’amarrage au sol, mais j’avais du temps, alors j’ai recommencé plusieurs fois. Claude a fait la même chose sur Gulliver. Matthieu a rajouté des bers et attaché LadyBird à un containeur. On s’est aidés mutuellement pour monter en tête de mât et on a insisté auprès du responsable du chantier pour qu’ils sécurisent ce qui pouvait s’envoler. Bref hier soir, on avait fait notre taf et j’étais à peu près satisfait. Sauf que les prévisions se sont dégradées : la télé cubaine annonce qu’Irma est revenue en catégorie 5 et qu’il y a eu des dégâts sévères à Camaguey où 1 million de personnes ont été déplacées. Ils prévoient aussi des inondations à la Havane, avec l’œil passant presque sur Varadero.
Velvet sanglé à Varadero


Samedi, 8 heures : on est évacués vers l’aile principale de l’hôtel. Tous les meubles du lobby ont été enlevés, c’est impressionnant. Il y a de l’eau et des sachets repas dans la chambre en prévision du moment où on ne pourra plus en sortir. La télé est toujours en boucle sur Irma. J’entends qu’il s’agit du plus puissant ouragan jamais suivi dans le monde et je commence à me faire à la réalité : avec un passage de l’œil aussi près, des dégâts majeurs sont à attendre sur le bateau. Je sifflote l’air de rien, c’est typique quand l’anxiété augmente. En attendant le pire, le wifi marche toujours, je peux donner des nouvelles et recevoir les encouragements de tout le monde.

Le chantier, avant
Samedi, 11 heures : toutes les chaines télé ont disparu d’un coup. Dans la marina, le vent est fort mais pas plus qu’un jour de bon Mistral, en beaucoup plus chaud quand même. Tous les bateaux amarrés ici d’habitude ont dégagé. Il pleut modérément. En général on appelle juste ça un temps pourri.

Samedi, midi : le wifi nous a lâchés. Depuis les coursives de l’hôtel on voit le chantier : tout est toujours bien en place, mais le vent doit à peine dépasser 50 nœuds. On sent que ça monte quand même, et la pluie aussi se renforce. Le pire est prévu pour cette nuit.


Le bunker
Samedi, 16 heures : les clients de l’hôtel sont transférés dans une grande salle au sous-sol. On doit être 300 personnes et c’est là qu’on va passer la nuit. Il y a des fauteuils, de la bouffe et de l’eau, mais pas de clim. Le personnel est nombreux, calme et attentionné. Les SMS vont et viennent. Coup de chance : une des fenêtres donne sur le chantier et on voit les mats de Velvet, Gulliver et LadyBird !

Samedi, 18 heures : le vent s’est renforcé et souffle du nord. Il pleut beaucoup, mais rien d’apocalyptique. Rien ne bouge sur le chantier.

Samedi, 19 heures : avec la pluie et la nuit qui tombe, on ne voit plus rien du tout à l’extérieur ; le vent se renforce encore

Samedi, 21 heures : on nous annonce qu’Irma vient de rentrer sur Varadero et va arriver sur nous ; toutes les fenêtres sont barricadées ; ça l’air de souffler très fort dehors, puis ça tourne à l’ouest ; ce sera fini quand le vent sera SSO, avec un deuxième pic prévu à ce moment-là. Je me dit que si ça se termine bien, chacune des sangles aura joué son rôle à un moment donné.

Samedi, 23 heures : on apprend que les hôtels autour de Cayo Santa Maria (à 5 heures de route au sud Est) sont détruits, ainsi que la route qui y mène. On estime les rafales à 100 nœuds. Le bruit de vent et de tôles qui claquent vient à présent de l’autre côté de la pièce. C’est normal que le vent tourne, mais je me demande comment Velvet pourrait bien résister à ça.

Dimanche, 1 heure : beaucoup essaient de dormir par terre en récupérant les coussins des fauteuils. Il fait toujours très chaud, les bébés pleurent …

Dimanche, 3 heures : on nous annonce qu’on va regagner nos chambres dans une heure. Puis finalement non, le vent est toujours trop fort pour sortir, on va finir la nuit ici.

Le chantier au petit matin
Dimanche, 7 heures : ça fait 30 minutes que je suis collé au carreau dans l’attente de voir quelque chose. Enfin le jour se lève, et on commence à distinguer les mâts de Velvet et de Gulliver, bien verticaux. Joie indescriptible. Même constat un peu plus tard pour LadyBird qui n’a pas quitté son containeur. Impossible de dire s’il y a des dégâts mais dans tous les cas, ce sera mineur. Avec Claude on prend la décision de se pochtroner au rhum dès le retour dans la chambre, pour fêter ça. Avec le jour qui s’installe, on voit d’autres bateaux sur le flanc ou bien les uns sur les autres. On voit aussi des arbres déracinés. J’annonce tout ça à Hélène et aux autres par SMS. Je reçois en retour que l’ouragan est maintenant au nord-ouest de Varadero et que l’œil nous serait passé à 100 km.

Le lobby au petit matin
Dimanche, 10 heures : on rejoint enfin la chambre après 18 heures passées en bas. On y sera reclus au moins jusqu’à cette après-midi. Au passage on peut voir que 3 pontons de la marina ont été arrachés. On est sans Wifi et sans télé, mais Hélène m’apprend par SMS que la zone côtière Matanzas-La Havane est inondée sur une bande de 250 mètres. Velvet a aussi échappé à ça, de justesse…






Velvet aussi beau à la fin qu'au début
Dimanche, 14 heures : la sécurité devient moins pointilleuse, et on s’échappe facilement de l’hôtel pour aller voir nos bateaux. Velvet n’a pas une égratignure, mis à part une antenne VHF en tête de mât qui a tordu son support. Chose étrange, la banquette arrière s’est ouverte, ce qui montre que le vent a aussi soufflé de bas en haut ! Gulliver ne semble souffrir que de l’ouverture intempestive d’un coffre de cockpit, autant dire rien.
Seul dégât apparent : l'antenne VHF a l'air penché 




Dégâts sur le chantier
Par contre d’autres bateaux ont démâté ou bien se retrouvent sur le flanc. Un grand cata s’est déplacé d’une dizaine de mètres. On voit aussi des toitures endommagées, des faux plafond par terre, des arbres abattus, des pontons en béton brisés. Ayala, le responsable du chantier, nous dit qu’ils ont mesuré 190 km/h de vent avec un anémomètre manuel (en passant le bras à travers la fenêtre, ça c’est cubain .. !) On apprend aussi que les cayos Coco, Santa Maria et Guillermo sont dévastées. Les rumeurs font état soit de 1 mort à Cuba, soit de 10.

Aujourd’hui lundi, de nouveaux touristes arrivent dans l’hôtel qui n’a pas encore retrouvé tout son éclat. Mais le business a repris. Les employés cubains ont été formidables, même en devant abandonner leurs propres maisons et familles pour veiller à la sécurité de tous. Chaque fois qu’on a pris de leurs nouvelles, ils nous ont répondu que ça s’était également bien terminé pour eux.

II y a 10 ans lors d’un séminaire à Taiwan, j’avais cru être marrant en regrettant au micro que nos hôtes n’aient pas prévu un typhon pour nous distraire. J’avais fait un bide. Vu de maintenant, je pense que c’était largement mérité.

2 commentaires:

Unknown a dit…

Bon, ben, maintenant que c'est fini, on ne peut que te féliciter pour la qualité du travail de prévention mis en place. A cuba, ils vont désormais s'inspirer de votre exemple!
quant à la photo du petit verre, en fait elle est prise après le 5 ou 6ième verre, non? vu la tête que vous faites et la qualité de la photo, je pencherai même pour le 10ième...
Allez, reviens vite passer quelques jours dans le midi pour te réconforter, et si tu fais un stop à Panam, n'oublie pas de faire signe!
Une grosse bise,
Bruno

Anonyme a dit…

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